J’ai vu un documentaire : l’asso qui en fait voir

Nicolas Le Gac a vu un documentaire, puis deux, puis des dizaines. En mars 2013, il a fondé l’association « J’ai vu un documentaire » à Lorient pour sensibiliser le public au « cinéma du réel ». Projections mensuelles itinérantes, Mois du doc, partenariats avec le Théâtre de Lorient et des médiathèques, l’association rayonne maintenant sur le Pays de Lorient.

Pourquoi créer cette association ?

Nicolas Le Gac : Je suis arrivé ici en 2008, et je trouvais que l’offre cinéma était trop restreinte, j’avais envie d’une proposition alternative aux grands réseaux, et surtout j’adore le documentaire ! Je voulais apporter cette forme de cinéma, peu présente en salle, à un public large.

Pourquoi le documentaire ?

J’ai découvert le docu pendant mes études et j’y suis très sensible. Je suis fan aussi de Ken Loach et du cinéma réaliste et social, et de tout ce qui laisse une place au spectateur dans l’approche et la compréhension du film.

Il y a une demande ou du moins une curiosité pour le documentaire ?

Il y a beaucoup d’aprioris sur le genre documentaire : c’est intello, ennuyeux, c’est du reportage… Or, le docu montre plutôt un regard d’auteur, il n’est pas formaté. Il offre aussi de grandes émotions, de la découverte, de l’évasion. Bref, ce n’est pas gagné d’avance mais on constate que ceux qui y goûtent y reviennent… Il y a du monde, on commence même à avoir des habitués.

Des projets ?

Beaucoup ! On travaille avec les médiathèques de Languidic, Ethel, Ploemeur. On va intensifier le rythme des projections, souvent suivies d’un débat ou d’une rencontre. On multiplie les lieux de projection : ferme du Cosquer à Lanester, la Grande Poudrière à Port-Louis, chez l’habitant, au Studio du Grand Théâtre, dans les bars… On travaille aussi avec Joël Jouanneau et son collectif pour créer un ciné-club itinérant. Et puis on lance des ateliers d’éducation à l’image et de réalisation pour les collèges et lycées.

Prochaines projections :

–          Studio ciné (avec le Théâtre de Lorient) / dim. 18 jan à 16h « A la folie » : Wang Bing a filmé le quotidien d’un hôpital psychiatrique de la province du Yunnan en Chine… Au Studio – Lorient

–          Port-Louis / autour du 14 février : courts-métrages documentaires pour la Saint-Valentin !

+ d’infos sur http://jaivuundocumentaire.fr

Anaïs s’en va-t-en guerre

En novembre, une pluie de films documentaires s’abat sur l’agglomération pour vous faire voyager sans bouger de votre siège. Sur les pas des anciens appelés d’Algérie, chez des syndicalistes jardiniers belges, dans l’apprentissage du métier de chef d’orchestre… Au total, plus de 20 films sont présentés dans 14 communes de l’agglomération de Vannes. Parmi la sélection, le film de Marion Gervais « Anais s’en va-t-en guerre » est le phénomène du moment : diffusé en avril sur TV Rennes, ce beau documentaire de 46 minutes rencontre un succès inattendu, avec plus de 500 000 vues en replay… Suivant le combat d’une jeune femme de 24 ans décidée à cultiver ses fleurs et plantes à infusions en Bretagne, le film a emporté les spectateurs dans le sillage de son impétueux sujet. Têtue, obstinée, battante et volontaire, Anaïs ne se laisse pas marcher sur les pieds : accroupie dans son champ, les mains dans la terre, occupée à monter sa serre, transformant sa caravane en séchoir, rien ne l’arrête. Et rien n’arrête le succès de ce film déjà racheté par France 4 et en partance pour les festivals européens. Car le documentaire peut aussi séduire et mobiliser s’il est sincère. C’est en tout cas ce que défend Marion Gervais, la réalisatrice.

 

Comment est né ce film ?

De ma rencontre avec Anaïs : quand je l’ai vue dans un champ, elle m’a parue sublime, il émanait d’elle une telle puissance et une liberté… Et puis on a discuté, elle m’a parlé de son projet. Elle a la force de tout faire pour réaliser ses rêves, de ne pas subir sa vie. Les choses se sont imposées, c’était instinctif : je l’ai filmée pendant 2 ans !

 

Comment expliquez-vous ce succès ?

Le film et le combat d’Anaïs ont touché quelque chose d’humain chez le public. Il n’y a pas de commentaires, ce qui fait que le spectateur se sent au contact d’Anaïs. Et finalement, ce qui m’a émue chez cette jeune femme finit par rejaillir du film. Cette gamine qui arrive à ce qu’elle veut sans se soumettre ni renoncer : on se projette dans ce modèle, ça nous redonne de l’espoir.

 

Expliquer, interpeler, bouleverser, c’est le rôle du documentaire ?

Il n’y a que le réel et la quête de vérité qui ont du sens pour moi. Le documentaire doit transmettre le réel selon le regard du réalisateur, comme un témoignage. C’est un éclairage, humain dans le cas de mon film, qui nous engage à mettre nos peurs de côté et à vivre sans passer à côté de nous-même. J’aimerais que mon film aille dans les lycées auprès des jeunes qui sont souvent déjà conditionnés par leurs peurs.

 

Quelles retombées de cette réussite ?

Pour Anaïs, humainement, ça lui donne plus de confiance en elle. Et puis elle reçoit beaucoup de soutien : 300 mails par jour, la production de Quark qui lui a créé une campagne de financement pour acheter sa terre, Rollinger qui vend ses tisanes à Paris… Mais elle continue à travailler 15 heures par jour ! Enfin, alors que le film avait été refusé par les chaînes de télévision, un tel succès montre que le public attend aussi autre chose, pas seulement du formaté. Ce film va droit au cœur.

 

Marion Gervais sera présente lors des projections de son film à l’occasion du Mois du Film documentaire.

Programme complet sur www.cinecran.org